La famille Lefèvre dirigeait les Chantiers Navals du Pas-de-Calais à Boulogne-sur-Mer dans les années 1920. Léon Lefèvre, à la tête de l'entreprise, a donné son nom à la société : "LÉON LEFÈVRE & Cie". Cette famille bourgeoise locale incarnait la réussite industrielle de l'époque.

Les photographies de la collection révèlent des portraits familiaux formels, typiques de la bourgeoisie industrielle des années 1920. On y voit plusieurs générations réunies : parents, enfants et probablement grands-parents, tous vêtus avec élégance - costumes trois-pièces pour les hommes, robes longues pour les femmes.

La famille participait activement aux cérémonies du chantier, notamment les baptêmes et lancements de navires. Leur présence sur les photos officielles témoigne de leur implication dans la vie sociale et économique locale.

La famille Ramet figure parmi les dynasties d'armateurs les plus influentes du port d'Étaples entre 1900 et 1994. Établie à Étaples depuis au moins 1836, cette famille de marins-pêcheurs est passée du statut de simples pêcheurs à celui d'armateurs innovants.

Leur contribution majeure réside dans l'introduction du chalut-bœuf (pêche en bœuf) dans les années 1950, qui a multiplié les prises par dix, transformant radicalement l'économie de la pêche étaploise. Aujourd'hui, sept générations plus tard, les Ramet continuent d'exploiter des armements actifs à Étaples, témoignant d'une remarquable continuité sur plus de 150 ans d'histoire maritime.

Le chantier naval de Léon Lefèvre & Cie était situé sur la rive de la Liane, à Capécure, Boulogne-sur-Mer. Actif dans les années 1920, il se distinguait par sa polyvalence : construction de chalutiers pour la flotte boulonnaise, yachts de luxe pour clientèle aisée, remorqueurs, et canots motorisés.

Les inscriptions visibles sur les photos révèlent l'identité complète du chantier : • "CHANTIERS NAVALS du PAS de CALAIS - LÉON LEFÈVRE & Cie" • Services : MOTEURS, MÉCANIQUE, CHARPENTE, FORGE MARITIME • Adresse : Rive de la Liane, Capécure, Boulogne-sur-Mer • Téléphone : 308

La vie autour du chantier naval Lefèvre était rythmée par les traditions maritimes locales. Les lancements de navires étaient des événements majeurs, célébrés avec faste : baptêmes officiels avec marraine et bouquet fleuri, drapeaux français hissés, et banquets sous bâche réunissant ouvriers et familles.

La "tradition du pot" marquait chaque étape importante : fin de construction, lancement, essais réussis. Ces célébrations soudaient la communauté ouvrière et témoignaient de la fierté du travail accompli.

Le chantier était stratégiquement situé sur la rive de la Liane, à Capécure, un quartier industriel de Boulogne-sur-Mer. Le Pont Marguet, visible sur plusieurs photos, servait de repère géographique majeur.

La Liane, fleuve côtier se jetant dans la Manche à Boulogne, permettait le transport des matériaux et des navires terminés. L'inscription "CAPÉCURE 1928" confirme la localisation et la date d'activité du chantier.

Les chalutiers construits au chantier Lefèvre étaient immatriculés à Boulogne (préfixe B.). L'analyse des photos a permis d'identifier 12 chalutiers boulonnais distincts, témoignant de la production intensive du chantier.

Ces navires étaient conçus pour la pêche au chalut en Manche et Mer du Nord, avec des caractéristiques adaptées aux conditions locales : coque renforcée, gréement dundee, et propulsion mixte voile/moteur.

Outre les chalutiers de pêche, le chantier Lefèvre construisait des yachts haut de gamme pour une clientèle aisée. Le MEDUSA et le GABYVONNE (1927) illustrent cette production de prestige.

Le MEDUSA se distingue par sa cabine luxueuse en acajou verni, lavabo en porcelaine blanche, et éclairage électrique - équipements modernes et coûteux pour l'époque. Le GABYVONNE, documenté avec la mention "1927", témoigne de la précision historique de la collection.

La présence de chalutiers britanniques immatriculés à Grimsby (GY.399, GY.382) dans les photos témoigne des échanges maritimes internationaux de l'époque. Boulogne-sur-Mer était un port important pour le commerce trans-Manche.

Le PROSPECT (GY.399), chalutier vapeur à double cheminée, illustre la technologie britannique avancée. Ces navires étrangers venaient probablement pour des réparations ou des échanges commerciaux.

Étaples-sur-Mer incarne l'esprit d'innovation et la richesse des traditions maritimes de la Côte d'Opale. Ce port à l'embouchure de la Canche a vu naître des générations de marins-pêcheurs qui ont révolutionné les techniques de pêche tout en préservant un patrimoine culturel unique.

En 1807, Étaples compte 1.507 habitants. Port de pêche côtière au caractère authentique, la communauté de pêcheurs y développe des savoir-faire transmis de père en fils depuis des siècles. La Canche offre un abri naturel pour les flocons et canots traditionnels.

L'âge d'or d'Étaples s'étend de 1880 à 1935. Population atteint 4.692 habitants en 1901 (multiplication par 3). Les marins étaplois innovent constamment : introduction du chalut-bœuf dans les années 1950 par Victor Ramet, perfectionnement des techniques de pêche au hareng, et adaptation aux nouvelles motorisations. La liaison ferroviaire (1875) permet d'acheminer le poisson frais aux Halles de Paris en 24 heures.

La communauté maritime étaploise se distingue par la densité de ses traditions : processions de la Pentecôte, bénédiction des bateaux, solidarité entre familles de pêcheurs, et savoir-faire artisanaux reconnus aujourd'hui patrimoine UNESCO.